L’histoire se déroule pendant la commémoration de l’indépendance d’Israël en 1948 et quelques jours avant la commémoration pacifique de la Nakba (« la catastrophe » en arabe), jour de deuil pour les Palestiniens (entre 1947 et 1949 environ 800 000 Palestiniens ont été expulsés de leurs terres par les forces israéliennes). Firas Khoury confie :
"Ce qui s’est passé après 1948 a été une grande catastrophe pour les Palestiniens. 80% de cette population est devenue réfugiée. Les 20% qui sont restés en Palestine [les territoires palestiniens occupés selon la dénomination de l’ONU] étaient dans un état traumatique et de peur. Ils ne savaient pas comment réagir face à l’occupation."
"La seconde génération avait peur de l’ordre établi. Elle n’a pas fait d’efforts pour s’opposer à l’establishment. Celle que je décris, que nous pouvons appeler la quatrième génération, est très fière et n’a pas peur de se confronter à l’ordre établi. Je suis convaincu que c’est cette génération qui mènera à la libération de la Palestine."
"Je voulais poser ma caméra sur ces individus qui sont rarement dépeints dans les médias. Et je voulais montrer au monde que ces adolescents, que l’on a l’habitude de traiter comme des chiffres et des statistiques dans l’actualité, ont des histoires propres. C’est le réel propos du film."
La question des réfugiés palestiniens
De nombreuses scènes abordent la question des réfugiés palestiniens lors de la première guerre israélo-arabe de 1948-1949, à travers une perspective israélienne. Or, durant cette période, 800 000 Palestiniens ont été chassés. Firas Khoury se rappelle :
"Je viens d’un village qui a été victime d’un nettoyage ethnique. Tout le village est devenu un camp de réfugiés en un jour. Les villes et villages palestiniens ont été vidés de leurs habitants, lesquels ont fini par travailler pour les Israéliens, dans la construction et dans les champs."
"Nous sommes parvenus, ma famille et moi, à revenir en Palestine. On a pu étudier l’histoire de notre terre, mais pas celle de notre catastrophe, la Nakba. Mon grand-père, par exemple, était fermier et a dû ensuite construire des maisons pour le compte d’Israéliens."
"On parle ici d’une population native qui a été privée de ses droits et de sa dignité. Donc, oui, je veux mettre la lumière sur cette histoire pour la confronter au récit national israélien, qui réécrit celle des populations qui vivent encore là-bas."
Production difficile
Firas Khoury a tourné en Tunisie. Il a choisi ce pays pour des raisons de budget et a rencontré beaucoup de difficultés à réunir de l’argent pour faire ce film. Il se souvient : "Cela m’a pris 10-11 ans avant de réunir le budget nécessaire. Personne ne voulait soutenir ce projet en raison de son parti pris narratif."
"Les fonds européens de financement se basent sur les politiques étrangères de leurs pays pour qui les événements de 1948 ne correspondent pas au début de l’occupation israélienne en Palestine, mais à l’indépendance d’Israël. Personne ne voulait soutenir mon scenario, qui affirme qu’Israël est un envahisseur ayant colonisé la Palestine. Abdherhamane Sissako, président de la commission d’aide aux cinémas du monde (ACM) du CNC, a soutenu le projet. Mais c’est le seul soutien que j’ai obtenu en Europe. Les financements viennent principalement d’Arabie saoudite, du Qatar et de Tunisie."