La Fille de son père vient en première intention d‘un personnage de Perdrix, Juju, le frère de Pierre Perdrix, interprété par Nicolas Maury. Un père célibataire qui élevait une fille de 12 ans, entouré de sa famille : "On suivait un peu leur histoire, et il y avait déjà cette question de la séparation entre eux, de l’enfant qui disait vouloir quitter son père mais sans l’abandonner. Ensuite, mon processus d’écriture, c’est de partir d’une idée, d’un thème un peu large, puis de nourrir le texte par fragments. J’ai l’habitude de prendre beaucoup de notes, il m’arrive d’écrire juste une scène, parfois quelques lignes de dialogues, parfois juste une image."
Puis j’essaie de fabriquer l’histoire à partir de ce matériau épars. Le début de l’écriture du scénario date du premier confinement, en mars 2020. C’est aussi le moment où j’ai arrêté de travailler comme journaliste et où je me suis lancé complètement dans le métier de cinéaste. Le confinement a fait que j’ai passé beaucoup de temps en famille, notamment avec ma fille. Donc le point de départ, c’est de raconter une relation père–fille, une histoire d’amour inconditionnel entre un parent et son enfant. Et aussi l’empire et l’emprise que l’un peut avoir sur l’autre, et inversement", précise Erwan Le Duc qui, pour l'occasion, signe son deuxième long métrage.
Erwan Le Duc a conçu pour les personnages de Rosa et à Youssef des dialogues très écrits, presque théâtraux, où, par exemple, les signes de négation sont respectés. Le cinéaste voulait que les deux jeunes parlent une belle langue, et notamment Youssef, avec son envie de romanesque. "En cherchant l’acteur pour ce rôle, j’ai dû voir près de cent vidéos de jeunes hommes qui déclamaient des poésies et, au milieu, il y avait Mohammed Louridi. Tout de suite, je me dis que c’est lui. Je le convoque pour des essais, et ça se confirme. C’est un garçon qui est venu à l‘art dramatique sur le tard, qui est actuellement étudiant à l’École du Nord, à Lille."
"Il n’avait jamais joué devant une caméra, et l’équipe et moi avions l’impression émouvante d’assister aux premiers pas d‘un acteur unique. Le côté très écrit me touche beaucoup, cela rejoint un cinéma que j’aime, je pense par exemple à celui de Kaurismäki, dont les acteurs racontent souvent, en interviews, que leurs personnages parlent un finnois très raffiné, très théâtral, qui ne cadre pas forcément avec leurs personnages."